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 Sans-abris

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MessageSujet: Sans-abris   Sans-abris EmptyMer 17 Fév 2010, 15:20

Je vous transmets ici la réponse de Monsieur Maxime BONO, Député de Charente-Maritime, Maire de La Rochelle concernant la lettre ouverte en faveur des sans abris qui a été envoyée à tous nos députés de France.

Je vous rappèle que ce mercredi 18 février sur France 3 sera débattu une nouvelle fois de ce problème à l’Assemblée Nationale.

Assemblée nationale – Compte rendu intégral
Deuxième séance du jeudi 15 février 2007
PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON

________

Droit au logement opposable
_________
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (nos 3656, 3671).

Discussion générale
Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Maxime Bono.

M. Maxime Bono. Madame la présidente, madame la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, mes chers collègues, jamais depuis bien longtemps notre pays n’a connu une telle incapacité à loger correctement ceux qui y vivent. À l’issue de ces cinq années, et malgré les promesses de vos gouvernements successifs, plus de trois millions de nos concitoyens sont particulièrement mal logés, en situation d’inconfort, d’insalubrité ou de surpeuplement.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Attendez ! Il faudrait d’abord remettre les choses à leur juste niveau !

M. Maxime Bono. Si l’on en croit le rapport annuel 2007 de la Fondation Abbé Pierre, cent mille personnes vivraient à l’année en camping ou en mobile home, cinquante mille auraient pour résidence principale une chambre d’hôtel, et cent cinquante mille seraient hébergées chez des tiers faute d’autres solutions, et dans des conditions de logement très difficiles.

Ces quelques chiffres, hélas terribles, suffisent pour mesurer l’ampleur de la crise !

Permettez-moi d’en citer deux derniers : il manquerait environ neuf cent mille logements et il existerait au minimum un million trois cent mille demandeurs en attente d’un logement social.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. La faute à qui ? Vous oubliez les « gouvernements successifs » de gauche !

M. Maxime Bono. C’est dans ce contexte accablant que, sous la pression d’une opinion publique légitimement émue par le sort des plus démunis, vous nous soumettez dans la précipitation ce projet dont l’ambition essentielle est d’instituer un droit au logement opposable.

Rappelons que c’est la loi Besson du 31 mai 1990 qui institua le droit au logement ; rappelons aussi que vos prédécesseurs, sur ces mêmes bancs de la droite, déposèrent contre cette loi portée par la gauche une série de recours devant le Conseil constitutionnel.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Mais non ! Vous dites n’importe quoi ! Quelle médiocrité politicienne !

M. Maxime Bono. C’est pourtant vrai, monsieur Dubernard ! Rappelons encore que c’est la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain, la loi SRU, adoptée en 2000 sous un gouvernement de gauche, qui a permis, par son article 55, un engagement sans précédent en faveur de l’accès de chacun au logement.

Souvenons-nous des recours déposés par l’opposition d’alors, comme du combat que vous n’avez cessé de mener contre cet article 55 tout au long de l’actuelle législature. Je comprends que cela vous irrite ! Souvenons-nous de vos propos, madame Vautrin : vous déclariez en novembre 2005 qu’« une proclamation de l’opposabilité du droit au logement serait irréaliste ». Rappelons-nous que l’année dernière, il y a à peine plus de huit mois, vous nous appeliez à nous associer à un « engagement national en faveur du logement » dont vous aviez soigneusement écarté l’idée d’un quelconque droit au logement opposable.

Rappelons enfin la proposition d’instituer le principe de l’opposabilité, que notre collègue Jean Yves le Bouillonnec a renouvelée chaque fois qu’un texte relatif au logement était débattu par notre assemblée… ainsi que vos refus successifs !

Permettez-nous donc d’affirmer qu’aujourd’hui vous vous voyez contraints de vous ranger derrière les positions qui toujours furent les nôtres.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. C’est une honte ! Vous n’avez rien fait, rien de rien, pendant vingt ans !

M. Maxime Bono. Car c’est bien contraints par la crise du logement générée par vos mauvais choix en la matière que vous empruntez cette voie dans l’urgence.

M. Michel Piron. « Générée » ? Certainement pas ! Les parents de la crise, c’est vous : nous n’en sommes que les enfants.

M. Maxime Bono. Sous la pression d’une opinion publique émue par la détresse des sans-logis et des mal-logés, vous nous proposez ce texte sans même l’accompagner des mesures qui permettraient de rendre l’opposabilité efficace.

À l’énoncé des chiffres que j’ai cités et qui donnent la dimension des difficultés de logement rencontrées par nos concitoyens, M. Borloo a coutume de brandir à bout de bras des graphiques flatteurs censés représenter une progression spectaculaire de la construction de logements dont vous vous attribuez collectivement le mérite. Vous annoncez régulièrement que quatre-vingt mille logements sociaux ont été réalisés, mais vous omettez de préciser que vos chiffres incluent les PLS, pour la construction desquels l’État ne verse pas un centime d’euro et dont la production a connu une hausse considérable.

En vérité, vos choix budgétaires – et notamment le coût du dispositif de Robien – ont sacrifié le financement de la production de logements sociaux adaptés à la demande, à savoir les PLAI et les PLUS,…

M. Michel Piron. Mais non !

M. Maxime Bono. …dont la production est restée stable, proche de cinquante mille, c’est-à-dire à peu près la moyenne de 2001.

M. Michel Piron. Vous étiez bien en dessous en 2000 !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Maxime Bono, Éric Besson, même combat !

M. Maxime Bono. Pendant ce temps, le nombre de demandeurs de logement à coût abordable n’a cessé de croître.

Il faut avoir le courage de le dire : aujourd’hui, au regard de la réalité de la demande, de sa faible solvabilité, les PLS, qui représentent près de 30 % de l’offre que vous produisez, sont trop peu accessibles à la majorité des demandeurs pour pouvoir être encore qualifiés de logements sociaux, ou même être considérés comme équivalant à du logement social. La vérité est que l’offre de logement social que vous produisez est inadaptée à la demande car elle reste, pour une trop grande part, inaccessible aux un million trois cent mille demandeurs de logements aidés.

S’agissant de l’offre globale de logement, vous nous rappelez régulièrement les quatre cent trente mille logements mis en chantier en 2006.

M. Michel Piron. Eh oui !

M. Maxime Bono. Mais seulement 15 % de ces constructions nouvelles seront accessibles à 75 % des ménages !

M. Michel Piron. C’est faux !

M. Maxime Bono. Quand bien même on se fixerait un objectif moins ambitieux, seuls 25 % de ces logements seraient accessibles aux deux tiers des Français.

En d’autres termes, c’est la production de logements chers qui a été privilégiée. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Le rapport 2007 de la Fondation Abbé Pierre est tout à fait clair sur ce point : « La progression de la construction locative sociale ces dernières années est principalement due à l’augmentation de la production de PLS inaccessibles pour la quasi-totalité des demandeurs sociaux, alors que la construction de véritables logements sociaux – PLAI et PLUS – stagne. »

M. Michel Piron. Pas du tout : elle augmente !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Quelle amnésie !

M. Maxime Bono. Ce sont les chiffres du ministère, monsieur Dubernard !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Sans doute les connaissez-vous par cœur, monsieur Bono, vous qui êtes inspecteur des impôts !

M. Maxime Bono. « Concernant le secteur locatif privé, poursuit le rapport, la dérive est la même. L’augmentation très rapide des loyers ces dernières années lui a fait perdre la vocation sociale qu’il exerçait jusqu’à une date récente. De fait, aujourd’hui, seuls 6 % des logements privés ont un loyer de niveau HLM. »

Dans le même temps, faute d’avoir été suffisamment revalorisées, les aides à la personne ont perdu de l’ordre de 10 % de leur pouvoir solvabilisateur, et des réformes récentes en ont exclu une proportion non négligeable de bénéficiaires.

Dans ces conditions, comment croire que les mesures que vous nous annoncez seront suffisantes pour garantir l’opposabilité du droit au logement ? Il faudrait, pour y parvenir, accompagner le texte par des dispositions fortes, à même de susciter la construction massive de logements à des prix abordables.

M. Jean-Louis Dumont. Bien sûr !

M. Maxime Bono. Au premier rang de ces mesures, il faut sans doute placer le renforcement de l’application de l’article 55 de la loi de solidarité et de renouvellement urbain, qu’il serait bon de rendre opposable à ceux qui, aujourd’hui encore, prétendent s’en affranchir.

M. Jean-Louis Dumont. Très bien !

M. Maxime Bono. À l’époque du vote de la loi SRU, l’actuelle majorité avait émis les plus grandes réserves sur les dispositions de cet article, promettant même son abrogation. Pourtant, en garantissant la construction, à hauteur de 20 %, de nouveaux logements destinés à la location à loyer modéré dans toutes les communes de plus de trois mille cinq cents habitants, la loi ne faisait que répondre à une exigence de justice, de solidarité et même, selon moi, à une forme de morale publique.

C’est d’ailleurs grâce à cette disposition, voulue et votée par la gauche et qui a impliqué bon gré mal gré – parfois même, convenons-en, contre leur gré – l’ensemble des collectivités, que vous pouvez aujourd’hui vous targuer de la construction de soixante-quinze mille logements sociaux en 2005.

M. Michel Piron. Et alors ?

M. Maxime Bono. Pourtant, vous n’avez eu de cesse de tenter d’en contourner les dispositions, incluant même dans le quota de 20 % l’accession sociale à la propriété ! S’il est bon d’encourager l’accession sociale à la propriété, il est de bien mauvaise politique de le faire au détriment du logement locatif. Le seuil de 20 % institué par l’article 55 représente un minimum. Il est le seul qui permette, par l’effort de solidarité qu’il induit, de proposer un logement locatif à loyer modéré à ceux qui sont à la recherche d’un toit.

Vous comprendrez donc que, malgré les amendements que nous avons déposés, nous ne nous fassions guère d’illusions sur votre volonté et votre capacité à garantir l’opposabilité par un renforcement du dispositif de l’article 55,…

Mme Christine Boutin, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Vous nous faites un procès d’intention, monsieur Bono !

M. Maxime Bono. …qu’il s’agisse de la possibilité de sanctionner plus sévèrement les contrevenants ou d’en étendre, comme nous le souhaitons, le champ d’application. Il est à craindre que la ville de Neuilly ne plafonne encore longtemps à 2,6 % de logements sociaux. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Caricature !

M. Jean-Pierre Brard. Ce n’est pas une caricature, monsieur Dubernard : Neuilly est une réserve de bourgeois !

M. Maxime Bono. M. Sarkozy, qui se complut dans cette politique, ou plutôt dans cette non-politique, vingt années durant dans son mandat de maire, ne la verra certainement pas infléchie par son successeur du fait de cette loi.

Au surplus, les quelques timides avancées obtenues lors de la lecture au Sénat ont été renvoyées aux calendes grecques lors de l’examen du texte en commission.

Votre dispositif prévoit la mobilisation du contingent préfectoral, mais à l’issue d’un véritable parcours du combattant pour les demandeurs.

M. Michel Piron. Mais non ! La mobilisation se fait au contraire sans délai !

M. Maxime Bono. Que se passera-t-il si l’on ne parvient pas à créer massivement des logements à des prix abordables ? Vous le savez bien : le dispositif prévu ne permettra la mobilisation que d’une petite partie des logements nouveaux qui font déjà l’objet d’affectations au profit de personnes en difficulté. Il faudra donc se contenter des logements qui viendraient à se libérer, mais qui seront particulièrement rares, car le taux de rotation dans le parc social est actuellement au plus bas. C’est dire que le nombre de logements disponibles sera sans commune mesure avec le nombre de demandes que l’État devra honorer à la suite de la décision de la commission ou du tribunal administratif.

M. Alain Néri. Très juste !

M. Maxime Bono. Qu’adviendra-t-il alors des titulaires de « demandes urgentes à satisfaire immédiatement » qui ne pourront être logés après épuisement du contingent préfectoral ? Selon la Fondation Abbé Pierre, le nombre de personnes répondant aux critères d’éligibilité que vous proposez pourrait avoisiner les 7 millions !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Voire 9 millions !

M. Maxime Bono. Même en s’en tenant aux 3 millions de personnes mal logées, prenons la mesure des attentes que ce texte fait naître !

Mme Christine Boutin, rapporteure. Justement : réjouissez-vous au lieu d’être tristes comme la pluie !

Mme la présidente. Venez-en à votre conclusion, monsieur Bono.

M. Maxime Bono. Ce projet ne peut avoir pour seule ambition, ou tout au moins pour seul effet, de modifier l’ordre de la file d’attente, auquel cas il ne ferait qu’opposer les mal-logés entre eux.

Dès lors que des communes parviennent, par le biais de l’accession sociale à la propriété ou par le recours abusif aux PLS, à se soustraire à leur obligation de solidarité sans être le moins du monde inquiétées par les dispositions nouvelles, que peut-il advenir de la mixité sociale ? Est-ce à dire que seules les communes qui se sont montrées soucieuses de construire des logements sociaux, de faire un effort de solidarité, seront visées par les affectations ? À défaut d’accroître l’offre de logements sociaux et face à votre frilosité pour mobiliser les logements privés, l’opposabilité restera un immense espoir, que vous aurez fait naître sans jamais lui permettre de se réaliser.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Vous exagérez ! Arrêtez !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Platitude et médiocrité !

M. Maxime Bono. Vous porterez une terrible responsabilité car, loin de satisfaire l’attente légitime des mal-logés, vous ne parviendrez qu’à opposer un peu plus encore les Français entre eux, à les désespérer davantage et à les éloigner un peu plus de la politique.

Mme Christine Boutin, rapporteure. Quel plaisir avez-vous à être négatif ? Essayez d’être positif !

Mme la présidente. Veuillez conclure, s’il vous plaît.

M. Maxime Bono. Ce n’est pas ce que le pays attend et ce n’est pas le texte que nous souhaitions pour assurer à chacun l’opposabilité du droit au logement.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Il fallait le faire vous-mêmes !

M. Maxime Bono. Nous tenterons, dans la discussion des articles, de proposer des mesures concrètes qui donneraient un sens à ce projet. En l’état, celui-ci ne demeure qu’une incantation, trop vague pour répondre à l’immense espoir que son annonce avait suscité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Voila, c’est tout, à vous de juger sur pièce sur la façon qu’à la majorité actuelle pour traiter de ce problème des sans abris et du logement en France.
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